Pour le respect que j’ai pour les
victimes, toutes les victimes de la crise qui a secoué mon pays, je suis
content d’être là dans l’affaire qui l’oppose au procureur pour que la
vérité soit sue afin que cessent les murmures. Madame la Juge, je ne
veux pas être libre de mes mouvements physiques tandis que ma conscience
innocente accusée à tort d’être la base de tous les torts est au dedans
de moi. Madame la Juge, à une certaine opinion qui estime à tort ou à
raison que le voyage à la CPI est un voyage de non retour, je pense
qu’un citoyen qui est suspecté par la Cpi peut venir ici, faire l’objet
d’un procès et s’il est innocent peut repartir chez lui. Et je sais que
je repartirai chez moi. Madame la juge, je n’ai pas été remis à la Cpi
dans les normes. Je voudrais le noter. J’ai été arrêté de manière
cavalière au Ghana, surpris dans mon sommeil, emmené manu militari au
Bureau National d’Investigation, mis dans un véhicule sans qu’on me dise
où on m’emmène. C’est dans la voiture que je me suis rendu compte qu’on
me ramenait en Côte d’Ivoire et pourtant les choses pouvaient se faire
dans les règles de l’art. On ne m’a pas permis de parler à un avocat,
mes droits élémentaires ont été violé Madame la Juge. Je voulais que
cela soit noté. Dans mon pays, avant qu’on me remette à la Cpi, pendant
14 mois, j’ai été séquestré Mme la Juge. Je ne pouvais voir personne et
personne ne pouvait me voir Mme la Juge.
Mme la juge, chaque fois qu’on
devait me déplacer, on me bandait les yeux avec un morceau de pagne, on
me mettait une cagoule. A la DST de mon pays où j’ai fais près de 9 mois
et demi avec pour voisin Jean Yves Dibopieu et Jean Noel Abehi, les
autres lieu où on m’a détenu, j’avais toujours les yeux bandé et jamais
je n’ai su ou j’étais. Madame la Juge, c’est tout dernièrement que mon
geôliers est venu pour me coiffer. Ils sont venus dans la chambre avec
des bagages; on a été au sous sol tout l’après midi et c’est quand nous
sommes remontés que la chambre était d’une propreté sans pareille. Ils
ont rangé des livres, ils ont rangé tout ce qu’il y avait à ranger et
ils avaient un appareil et ils ont commencé à me photographier. Ils me
disent: « il faut sourire » puis je souris, « fais comme si tu étais
entrain de lire » et je lis. C’est plus tard que je me suis rendu compte
que c’était une mise en scène que le ministre de la sécurité venait de
faire. Madame la Juge, j’ai été réveillé le 21 mars à minuit, on m’a
bandé les yeux, on m’a mis une cagoule, on m’a mis dans un véhicule. De
minuit jusqu’au matin, j’étais assis dans une chaise, les yeux bandés,
la tête encagoulée et c’est la matin quand on m’a enlevé la cagoule que
je me suis rendu compte que j’étais à la DST à nouveau; mis dans un
véhicule, on m’a conduit chez le procureur. Madame la Juge, c’est là
qu’on m’a signifié votre mandat d’arrêt. Le même jour, au pas de course,
les autorités de mon pays ont fait siéger la chambre d’accusation qui
devait approuver mon transfèrement. Madame la Juge, c’est comme ca que
j’ai été remis le lendemain à la Cpi. J’estime qu’on peut faire la
politique….Quelqu’un est accusé, avec tous ses droits, on peut le mettre
en prison et s’il est reconnu coupable, il est condamné…Si je suis
reconnu coupable, que la loi s’applique à moi dans toute sa rigueur mais
si je suis jugé pour ce que j’ai fais et non pour ce que je suis, que
je sois reconnu innocent et que je rentre chez moi; et je sais que je
vais retourner chez moi. Quand dans mon pays, on me traque, on traque ma
famille, on fait un chantage à ma famille biologique et politique, mon
médecin en prison, tous mes collaborateurs emprisonnés pas pour ce que
j’ai fais mais pour ce que je suis. Parce que si on devait me poursuivre
en Côte d’Ivoire pour ce que j’ai fais, il y a beaucoup de
personnalités pro Ouattara qui ne peuvent même pas me regarder en face.
Madame la Juge, je ne veux pas être
la honte de ma génération, je ne veux pas être la honte de ma famille et
de mes enfants. Je suis venu ici et je me considère en mission pour la
manifestation de la vérité. Je suis pro Gbagbo et je suis fier de
l’être. Je l’étais hier, je le suis encore aujourd’hui. Madame, j’ai
appris avec Gbagbo le dialogue, j’ai appris avec Gbagbo la
réconciliation, j’ai appris avec Gbagbo qu’il faut convaincre
l’adversaire et non le vaincre et pour cela, je suis pour la
manifestation de la vérité. Madame la Juge, que la paix soit en Côte
d’Ivoire et que la Côte d’Ivoire ne s’embrase pas à cause de moi. Je
vous remercie. Je suis venu à la Haye, c’est ici que j’ai appris qu’un
individu peut avoir des droits qui lui sont reconnus et je voudrais vous
remercier pour ca d’ailleurs. Je suis bien traité ici et je suis animé
d’un double sentiment parce que quand on m’emmenait à La Haye ici,
beaucoup ont pleuré et pourtant en Côte d’Ivoire, je vivais le calvaire.
Chaque jour, je vivais dans l’angoisse, chaque minute était un combat.
J’étais comme un objet dont on disposais quand on voulait et comme on
voulait…J’ai été logé, je ne peux pas demander qu’on me loge dans un
hôtel à quatre étoiles. Un prisonnier est un prisonnier dans tous les
cas et je suis préparé à cela, je suis prêt. Mais j’ai quelques
observations à faire et je souhaite pour le respect que j’ai pour la
Cour qu’on vous en parle à huis-clos. Je vous remercie.
NB: Compte tenu des coupures lors de la
retransmission, certaines infines parties du discours ont pu être
omises. Cependant, l’essentiel de l’intervention est fidèlement
reproduite.
commentaire de CBG
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