lundi 22 octobre 2012

Pdt des syndicats des transporteurs d’Abobo à Ouattara: "voici nos conditions pour la paix à Abobo»

Pdt des syndicats des transporteurs d’Abobo à Ouattara:

Une semaine après le déguerpissement de la gare d’Abobo, les langues continuent de se délier. Cette fois-ci, c’est l’un des «boss» des transporteurs et des syndicalistes qui parle.
Vous êtes très remonté contre le déguerpissement de la gare d’Abobo.
Oui. Mais avant tout, nous présentons nos excuses au chef de l’Etat, Alassane Ouattara, pour les malheureux évènements qu’il y a eu lundi pendant le déguerpissement. On nous a fait croire que c’est lui qui a donné les instructions pour démolir la gare...

Vous ne pensez pas que c’est le cas ?
Si. C’est pour cela que nous avons arrêté de résister, car le président de la République, c’est notre papa. Mais nous souhaitons qu’il nous donne un endroit où nous allons nous installer.

Pourquoi pas à la Sogegare, elle a été faite pour vous?
Les conditions de cette gare sont difficiles. On demande à chaque transporteur de payer 2,8 millions de FCFA.

A vous entendre, vous n’allez pas y aller ?
Nous l’avons clairement indiqué aux autorités.

Mais les services de la mairie affirment que les transporteurs sont d’accord pour s’installer à la Sogegare. Certains auraient déjà acquis leurs gares à l’intérieur. Dans une interview qu’il nous a accordée, le président du Collectif des chauffeurs d’Abobo est allé dans le même sens.
Nous sommes les patrons des chauffeurs, c’est nous qui avons le dernier mot. Pour ce qui est de la mairie, nous avons dit que cette gare est trop chère pour nous.

Et si on baissait les tarifs?
Il faut être réaliste. Normalement, les transporteurs doivent avoir une gare publique et non privée. Nous n’irons donc jamais à la Sogegare. Il faut que le chef de l’Etat trouve un autre espace pour nous. La ministre de la Salubrité urbaine, Anne Ouloto, a affirmé qu’elle nous a proposé deux sites, mais c’est faux. On ne nous a jamais laissé le choix. S’il y avait un autre site autre que la Sogegare, nous serions allés là-bas.

Les services techniques de la mairie indiquent qu’il y a eu une discussion avec vous et qu’il est prévu que vous gariez dans des endroits déterminés au sein de la commune...
Nous ne voulons pas garer au bord de la route. Qu’on nous trouve une gare.

Ya-t-il un autre endroit à part la Sogegare où on peut loger les transporteurs ?
Il y a un site en face de Mobile (sur la route d’Abobo-Anador) et un autre près de Mtn (non loin du camp commando d’Abobo).

Ces sites peuvent-ils accueillir les transporteurs de la commune?
Oui, s’ils sont réhabilités.

Vous auriez dû discuter de tout cela avec les autorités. C’est peut-être trop tard, car aujourd’hui on vous accuse d’avoir tiré sur les forces de l’ordre pendant le déguerpissement.
Je suis mort de rire quand j’entends cela. Nous n’avons jamais tiré sur les forces de l’ordre. Il y a des vidéos qui le démontrent. Ceux qui ont tiré, ce sont plutôt les militaires, les gendarmes et les policiers. Nous avons eu plusieurs blessés et huit morts.

Il y avait peut-être des personnes armées dans la foule que vous n’avez pas vues.
Je suis sûr de ce que je dis : les manifestants n’ont jamais tiré. Nous n’avions que des pierres pour revendiquer.

Revendiquer quoi ?
Nos droits à une gare.

N’est-ce pas parce que cette gare était votre vache à lait que vous avez fait cette résistance ? Il se raconte que vous rackettiez les commerçants. Et que vous vous en tiriez avec la coquette somme de 7 millions par mois.
Ce sont des ragots. Mais il faut être sur le terrain pour voir la réalité. Normalement, pour avoir une bonne corporation, il faut une bonne organisation. Nous prenions de l’argent avec les commerçants, c’est vrai, mais c’était pour assurer leur sécurité. C’est grâce à nous que l’insécurité a baissé à Abobo. Les commerçants venaient vendre et se retournaient chez eux sans être agressés. Nous avions des gardiens qui dormaient à la gare.

Cela signifie-t-il que le banditisme va augmenter avec la démolition de la gare ?
Abobo compte 1.600 worô-wôrô et 500 gbakas (véhicules de transport en commun). Nous avions 17.000 jeunes qui exerçaient à la gare. Parmi eux, des ex-combattants. Et Dieu seul sait qu’ils sont nombreux. Ils étaient chauffeurs, syndicalistes ou chargeurs. Ces personnes sont maintenant à la rue et vont augmenter évidemment le banditisme que nous avions réussi à faire baisser considérablement grâce à cette gare.

Il y a donc une menace dans l’air ?
Oui. C’est pour cela que nous demandons au président de la République de faire face à la jeunesse d’Abobo. Car c’est un cas grave. Si ces jeunes jetés à la rue ne trouvent pas un boulot, il y aura permanemment l’insécurité ici. Il faut qu’il nous parle. Nous sommes prêts à l’écouter. Comme je l’ai dit, c’est notre papa.


Interview réalisée par Raphaël Tanoh



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